"Cap sur l’économie régénérative" : un appel urgent aux dirigeants d’entreprises
- julia31239
- 21 oct. 2024
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 22 oct. 2024
Pourquoi les entreprises doivent adopter une approche régénérative pour survivre et prospérer dans un monde en crise ?
L’économie régénérative est plus qu'une tendance ou un concept abstrait : c’est une réponse urgente à la crise systémique qui menace notre planète et nos sociétés. Dans une conférence intitulée "Cap sur l’économie régénérative", Christophe Sempels a mis en lumière les graves enjeux auxquels nous faisons face en tant qu’êtres humains, et le rôle crucial que les entreprises doivent jouer pour éviter une catastrophe planétaire. Son message est clair : les modèles économiques actuels sont obsolètes. Pour les dirigeants d’entreprises, il est impératif de passer d’une logique de réduction des impacts négatifs à une véritable ambition de générer des impacts positifs nets sur les écosystèmes et les sociétés.
Dans cet article, nous allons résumer les points clés du discours de Christophe Sempels, tout en soulignant l’urgence d’agir pour intégrer l’économie régénérative au cœur des stratégies d’entreprise. Il ne s’agit pas seulement d’adopter des pratiques éthiques ou durables, mais de transformer radicalement la manière dont les entreprises créent, distribuent, et utilisent la valeur. Ce tournant est vital, non seulement pour la planète, mais aussi pour la survie économique des entreprises dans un monde en mutation rapide.
Le contexte global : une planète sous pression
Christophe Sempels commence son intervention en expliquant le contexte historique et environnemental dans lequel l’économie régénérative s’inscrit. Depuis des millions d’années, la Terre a connu des fluctuations climatiques extrêmes, mais c’est grâce à une période de stabilité climatique, survenue il y a environ 10 000 ans, que les civilisations humaines ont pu se développer. Cette stabilité, cependant, est aujourd'hui en péril. Les activités humaines ont déclenché ce que les scientifiques appellent la grande accélération, marquée par l’augmentation exponentielle de diverses variables environnementales et économiques : émission de gaz à effet de serre, destruction des écosystèmes, surpêche, changement d’affectation des sols, et plus encore.

Cette accélération mène à une rupture des boucles de rétroaction négatives, ces mécanismes naturels qui régulent le climat et maintiennent un équilibre sur Terre. En dépassant les limites planétaires, notamment en matière de biodiversité, de réchauffement climatique et d’acidification des océans, nous risquons de déclencher des rétroactions positives, des effets d’emballement qui échappent à tout contrôle et peuvent rendre la planète hostile à la vie telle que nous la connaissons.
Le premier message clé pour les dirigeants d’entreprises est donc clair : nous vivons au-delà des capacités de la Terre à se régénérer. Si nous ne changeons pas radicalement notre manière de produire et de consommer, nous allons vers des scénarios catastrophiques, non maîtrisables et imprévisibles.
Limites des modèles économiques actuels
La plupart des entreprises fonctionnent selon un modèle économique volumique, c’est-à-dire basé sur la vente toujours plus massive de produits ou services, souvent à des marchés saturés. Ces modèles, explique Sempels, sont non seulement limités sur un plan économique, mais ils sont surtout désastreux sur les plans environnemental et social. Pourquoi ? Parce qu'ils encouragent une surproduction et une obsolescence programmée, rendant impossible toute réelle réduction des impacts environnementaux.
Même les stratégies traditionnelles de responsabilité sociale et environnementale (RSE), qui visent à réduire les impacts négatifs, ne sont plus suffisantes. Pour Christophe Sempels, ces stratégies ne font que ralentir le débordement d'une baignoire dont le robinet est toujours ouvert à plein débit. Autrement dit, réduire les émissions ou les déchets tout en continuant à consommer massivement ne peut pas inverser la tendance. Il faut arrêter de se contenter de réduire les impacts négatifs et viser plutôt à générer un impact positif net.
L’économie régénérative : un nouveau paradigme
L’économie régénérative est définie par Christophe Sempels comme une approche visant à générer un impact positif net sur les écosystèmes et les sociétés. Contrairement à l'économie traditionnelle, qui exploite les ressources naturelles jusqu'à épuisement, l'économie régénérative s'inspire des systèmes vivants et de leur capacité à se renouveler.
Repenser la création de valeur
Le premier point abordé par Sempels concerne la création de valeur. Pour passer à un modèle régénératif, les entreprises doivent se poser une question fondamentale : Quel besoin humain notre produit ou service satisfait-il, et comment pouvons-nous le faire tout en régénérant les écosystèmes plutôt qu'en les détruisant ?
Cela implique souvent de passer d’une logique de vente de produits à une logique de vente de services ou d’usage. Par exemple, un fabricant d’électroménager pourrait passer de la vente de lave-linge à la location de cycles de lavage. Dans ce modèle, l’entreprise a tout intérêt à prolonger la durée de vie des machines et à minimiser leur consommation d’énergie et d’eau. Cette approche favorise la conception durable, la réduction des déchets, et l'économie circulaire, car l'entreprise reste propriétaire des machines et peut en récupérer les composants en fin de vie pour les réutiliser.
Se reconnecter au vivant
Un autre point central de l’économie régénérative, selon Christophe Sempels, est la nécessité pour les entreprises de se reconnecter au vivant. Pourquoi ? Parce que seuls les systèmes vivants sont capables de se régénérer. Cela signifie que les entreprises doivent intégrer des processus, des infrastructures et des produits qui respectent et régénèrent les écosystèmes.
Par exemple, dans le secteur agricole, des pratiques comme l’agroforesterie, la permaculture ou l’agroécologie sont des moyens de restaurer les sols, de séquestrer le carbone et de favoriser la biodiversité. Pour les entreprises qui ne sont pas directement liées à la nature, comme celles du secteur des services ou de l’industrie, la régénération peut passer par la végétalisation des infrastructures, la gestion responsable de l’eau, ou l’utilisation de technologies inspirées du vivant.
L’exemple de Pocheco : une entreprise à visée régénérative
Christophe Sempels a illustré son propos par l'exemple concret de l’entreprise Pocheco, située dans le nord de la France, qui fabrique des enveloppes. Dirigée par Emmanuel Druon, Pocheco a réussi à transformer son modèle en intégrant des pratiques régénératives à tous les niveaux.
Pocheco a revu sa production en éliminant les solvants et colles chimiques au profit d’encres végétales. Ils ont mis en place un système de phytoépuration, où une bambouseraie traite naturellement les eaux usées de l’usine, tout en réduisant leurs émissions de carbone. En outre, l'entreprise a réintroduit des pratiques agricoles durables autour de ses installations, produisant des aliments bio pour ses employés, tout en renforçant la biodiversité locale.
Une nouvelle dynamique de performance
Ce type de transformation, selon Sempels, illustre comment les entreprises peuvent réinventer leur modèle économique pour intégrer une nouvelle dynamique de performance. Cela nécessite de reconsidérer non seulement la manière dont les produits sont conçus, mais aussi la manière dont la valeur est monétisée. Les entreprises doivent se libérer de la logique du volume pour se concentrer sur l’usage optimal de leurs produits, et veiller à ce que leurs activités créent des bénéfices nets pour la société et l’environnement.
Conclusion : un appel à l’action pour les dirigeants
En conclusion, Christophe Sempels a rappelé que nous sommes à un tournant civilisationnel. Les dirigeants d’entreprise ont un rôle crucial à jouer dans la transformation vers une économie régénérative. Il ne s'agit plus de minimiser les dommages, mais de réparer et régénérer notre planète. L'économie régénérative n'est pas seulement une nécessité environnementale, elle est aussi une opportunité économique pour les entreprises capables d’anticiper les changements et d’adopter de nouveaux modèles de création de valeur.
Les entreprises qui continueront à ignorer ces réalités risquent de disparaître, dépassées par un monde où les ressources se font rares et où les consommateurs et les gouvernements exigent des solutions durables. Les pionniers de l'économie régénérative, quant à eux, deviendront les leaders de demain, non seulement parce qu'ils respecteront les limites planétaires, mais aussi parce qu'ils offriront à leurs clients des produits et services en phase avec les valeurs de la nouvelle génération.
Il est temps pour les entreprises d'agir. L’économie régénérative n’est pas une option, mais une nécessité. En adoptant ce nouveau paradigme, les dirigeants peuvent contribuer à la régénération de la planète tout en assurant la pérennité de leurs entreprises dans un monde en crise.